En errant dans la lande...
A un mille plus loin, au-delà des près, dans la direction opposée à celle de Millcote, passait une route que je n'avais jamais prise, mais que j'avais souvent remarquée en me demandant où elle menait : ce fut de ce côté que je dirigeais mes pas. Le moment n'était plus aux tergiversations, aux regards en arrière, ni même en avant. Il ne fallait penser ni au passé ni à l'avenir. Le passé était une page si divinement douce, si mortellement triste, que la lecture d'une seule de ses lignes aurait suffi à faire évanouir mon courage, à briser mon énergie. L'avenir était un néant affreux, quelque chose comme le monde après le déluge.
Je longeai les champs, les haies, les sentiers, jusque après le lever du soleil. Je crois que c'était une radieuse matinée d'été, j'ai souvenir que les souliers que j'avais mis en quittant la maison furent bientôt tout humides de rosée. Mais je ne regardais ni le soleil qui apparaissait à l'horizon, ni le ciel bienveillant, ni la nature à son réveil. Celui que l'on conduit à l'échafaud à travers un paysage charmant ne pense pas aux fleurs qui lui sourient au passage, mais au billot, au tranchant de la hache, à la rupture de ses os, de ses veines, à la tombe qui s'ouvre au bout du chemin. Je pensais à ma triste fuite, à ma course vagabonde, sans abri ; je pensais, et avec quelle angoisse, à ce que je quittais. C'était plus fort que moi.
Charlotte Brontë - Jane Eyre
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Commencé il y a quelques temps déjà et terminé tout récemment pour cause de besoin urgent de mon aiguille circulaire 5 mm.
Wandering the moor de Celeste Glassel (en taille regular)
Tricoté en alpaga-mérino Iceyarn (80% mérinos, 20% alpaga) coloris Dark cream
et cosy d'Anny Blatt (65% kid mohair 35% soie) coloris naturel
Aiguilles 5 mm